L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a confirmé auprès du « Quotidien » que la commission d’évaluation initiale du rapport bénéfice/risque des produits s’est prononcée en faveur de la mise en place d’une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du Truvada (emtricitabine, ténofovir disoproxil), dans le cadre de la prophylaxie pré-exposition (PrEP) destinée à prévenir les infections par le VIH. Cet avis a été émis jeudi soir, à l’issu de la dernière réunion du comité.
Cette RTU est très attendue par les acteurs associatifs : l’association AIDES avait déposé la demande en début d’année 2014, mais la première réunion du comité scientifique spécialiste temporaire dédié à cette question n’a eu lieu qu’un an plus tard, le 26 janvier 2015.
S’il reste prudent et préfère attendre la publication de l’avis de l’ANSM, le directeur général de AIDES, Vincent Pelletier, salue tout de même « une bonne nouvelle ». Il rappelle que « 70 % des homosexuels se protègent lorsqu’ils ont une relation sexuelle avec un nouveau partenaire contre 10 à 20 % des hétérosexuels. Malgré cela, leur taux de contamination est deux fois plus élevé. C’est bien le signe qu’ils sont dans des situations à risque telles que de nouveaux moyens de prévention sont nécessaires ».
PrEP continue ou à la demande
Les détails de cette RTU ne sont pas encore connus, l’avis devant être finalisé avant sa publication sur le site de l’ANSM, et son protocole reste à élaborer. Selon l’actualisation du rapport du Pr Philippe Morlat, présenté le 9 octobre dernier lors du congrès annuel de la société française de lutte contre le sida, « l’efficacité de la PrEP à la demande n’a été prouvée que chez les hommes ayant des relations sexuelles non protégées avec des hommes (HSH), elle ne peut donc pas être recommandée chez les autres catégories, comme les femmes ».
Concernant le type de PrEP, continue ou à la demande, Vincent Pelletier estime qu’il faut « permettre l’accès aux deux et laisser au médecin et au patient la possibilité de faire un choix en fonction de la situation. Une situation à risque peut être tellement fréquente qu’une PrEP en continue peut être préférable pour un temps malgré le coût supérieur. » Il évoque notamment le cas des couples serodiscordants au cours des 6 premiers mois de traitement.
D’après une source proche du dossier, l’avis de la commission de l’ANSM préconiserait l’autorisation du Truvada dans le cadre d’une PrEP intermittente (à la demande) pour les HSH, et continue pour les autres catégories à risque, comme les consommateurs de drogues injectables ou les personnes transsexuelles.
Le remboursement en question
L’ANSM dispose maintenant de deux mois pour finaliser son avis. La ministre des Affaires sociales et de la santé pourra ensuite saisir la Haute Autorité de santé (HAS) qui aura à son tour deux mois pour se prononcer sur le remboursement. « Une RTU sans remboursement n’aurait aucun sens, estime Vincent Pelletier, cela reviendrait à une inacceptable discrimination économique. »
« Je crois que c’est une décision politique, qui n’est pas facile à prendre, et qui est maintenant entre les mains de notre ministre de la Santé, commente auprès du « Quotidien » le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS. La crainte, c’est que ceux qui utilisent la PrEP se mettent à moins utiliser le préservatif, mais soyons clairs : on parle d’une population qui n’utilise déjà naturellement pas le préservatif. »
Selon plusieurs sources concordantes, le remboursement aurait déjà été décidé, et son annonce devrait intervenir dans les semaines à venir.
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