LE QUOTIDIEN - Il y a eu un premier ouvrage « Faire société » en 1999. Pourquoi une nouvelle édition aujourd’hui ?
BERNARD DELANGLADE - Ce livre, dirigé par François Bloch-Lainé, visait à donner de l’épaisseur à la place des associations comme acteur dans la cité. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que cette place est fondée. Mais ce sont les rapports entre les associations de solidarité et la société, et notamment les pouvoirs publics, qui ont changé radicalement. Les associations n’ont pas vraiment changé, mais le paysage s’est brouillé. Pour moi, l’ouvrage de 2010 s’interroge sur la question « Comment être encore des acteurs sociaux valides si on ne prend pas en considération le brouillage des cartes et le contexte dans lequel les associations doivent évoluer? » Les deux ouvrages ne se répètent pas, ils sont plutôt complémentaires.
Quelles plaintes repère-t-on de plus en plus dans ces associations de solidarité ?
Ce qui se passe, me semble-t-il, c’est un changement imposé par la crise de la considération que portent les pouvoirs publics aux associations, en introduisant de manière massive aujourd’hui la régulation économique, la maîtrise des coûts, le renforcement du poids de l’État et l’exigence de performances. Pour autant, dans ce livre, il n’est pas question de la mort annoncée des associations, au contraire. J’ai envie de dire : « Arrêtons la plainte, passons aux actes ! » Soyons lucides pour analyser le contexte, nous avons des spécificités et des forces, c’est le moment de nous en servir dans des stratégies positives, au moment où il y a de plus en plus de gens fragiles. Le secteur associatif possède cette faculté de savoir s’adapter.
Comment peut-on faire cohabiter la régulation des coûts, etc., avec l’engagement associatif et le principe de solidarité à l’œuvre dans les associations ?
En étant d’abord convaincus que les associations sont des acteurs sociaux. C’est avec cette conviction qu’on peut dire qu’il y a des points de levier possibles, des espaces à conquérir et qu’il ne faut pas tomber dans les travers du tout-état ou du tout-marché. Pour le sociologue Jean-Louis Laville, l’heure de l’économie sociale et solidaire est arrivée. « C’est une économie dans laquelle le lien est aussi important que le bien. » Faire société, c’est justement faire du lien, et c’est ce qui nous fait avancer. C’est ce qui nous fait dire que même face à un état régulateur, un état puissant, les associations de solidarité doivent porter la parole de gens. Les associations ne peuvent plus seulement faire, mais elles doivent dire. Parce qu’elles sont convaincues de ce qu’elles sont et de ce qu’elles représentent. Il faut qu’elles occupent le terrain du débat public.
C’est le sens aussi de l’Interpellation du Premier ministre, en juin, signée par une dizaine de grandes fédérations du secteur médico-social et de l’exclusion ?
Dix présidents de grandes fédérations nationales ont voulu attirer l’attention du Premier ministre pour que ce qui se met en place avec le plan de rigueur ne déconstruise pas tout ce qui se fait autour de l’accompagnement des personnes les plus fragiles (personnes handicapées, malades, chômeurs, sans-abris, etc.). Ce courrier ne défend pas les associations mais une politique sociale et la solidarité nationale. Notre mission, c’est de défendre la mise en œuvre de la participation à la défense de l’intérêt général. Cet ouvrage de 2010 est traversé par cette question de l’intérêt général.
* 272 pages, 25 euros.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation