Six mois après le suicide d’un neurochirurgien sur son lieu de travail et quatre mois après la remise du rapport accablant du médiateur national Édouard Couty, le CHU de Grenoble a présenté en fin de semaine dernière son plan d'action pour l’amélioration de la qualité de vie au travail.
S'il est loin d'être le seul établissement de santé à être le théâtre de drames humains et de situation de harcèlement, le CHU de Grenoble a par cette action tenter d'apporter autant des solutions concrètes à la crise vécue en interne que des réponses plus larges à la problématique des risques psychosociaux à l'hôpital.
Né dans une situation de crise, ce plan recense 400 idées et propositions, fruits de nombreuses réunions des groupes de travail (incluant les personnels) et d'un dialogue parfois « rude et rugueux », de l'aveu du président de la commission médicale d'établissement (CME), le Pr Jean-Pierre Zarski. « Le dialogue a été et existe encore. Il n’y a pas d’omerta. Il n’y en a jamais eu », a insisté Jacqueline Hubert lors d'un point presse. S'inscrivant « en faux » contre l'analyse d'Édouard Couty, la directrice générale du CHU s'est une nouvelle fois défendue d'être une « harceleuse ».
Ce qui « pourrit » le quotidien des soignants
Les groupes de travail ont planché sur les enjeux de management, la gestion des risques psychosociaux et des conflits, les ressources humaines et la gouvernance.
Jacqueline Hubert a pointé trois générateurs de stress qui « pourrissent » le quotidien des 9 500 personnels, dont 2 400 médecins : les ruptures d’approvisionnement, les remplacements d'agents et la gestion de l’aval des urgences.
La directrice générale a annoncé un plan de fluidification de l’approvisionnement et le « doublement » du pool de paramédicaux (infirmières et aides-soignantes). Une réflexion va être menée sur la création d'autres pools de personnels dédiés.
Concernant les urgences, la gouvernance a prévu de mettre en place cet été un système d'informatisation du pilotage des lits. Pour soulager les équipes, elle compte aussi s'appuyer sur la nouvelle maison médicale de garde, située dans l'enceinte de l'hôpital, où des médecins généralistes soignent des patients chaque week-end (le samedi de 12 heures à minuit et le dimanche et jours fériés de 8 heures à minuit) depuis le début de l'année.
La formation managériale, demandée par les médecins séniors et les étudiants, sera instaurée et systématisée.
Chaque service sera doté d’un baromètre sur la qualité de vie au travail qui établira un état des lieux annuel, à partir de juin 2018. Il sera complété d’un dispositif d’alerte sur les risques psychosociaux. Des médiateurs internes et externes prendront en charge des situations de souffrance. Un médiateur formé issu du corps médical est déjà en action. Une douzaine d'autres volontaires, en cours de recrutement, seront formés en interne. Une cellule d’intervention complétera le dispositif.
Des syndicats pas tout à fait convaincus
Sur place, plusieurs agents ont fait part de leur scepticisme. « Aujourd'hui, la souffrance des personnels est terrible, témoigne un représentant de la CFDT. Ils n’ont pas complètement compris la mise en œuvre du plan. Les cellules ne sont pas entièrement en place. Écouter est une chose, prendre en compte, expliquer, en est une autre. »
Une représentante de l’UNSA confie également ses doutes : « Dommage qu’on ait parlé si peu des paramédicaux. On est dans l’attente. On n’est pas dans la bienveillance et la bientraitance. Il y a quelque chose de perdu. Il est urgent de le retrouver. Le respect, tout simplement. »
L'hôpital s'est donné six à douze mois pour déployer son plan d'action et en analyser les premiers résultats. « Retrouver la confiance ne se fait pas en deux jours », a concédé le Pr Jean-Pierre Zarski.
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