Monsieur le Directeur,
Par la présente lettre, je veux vous faire part de mon écœurement par rapport aux pratiques de votre Caisse, concernant une mesure phare de la politique de santé actuelle, à savoir le tiers payant.
En effet, depuis quelques jours, je reçois sur ma boîte mail des refus de factures de la part de votre Caisse, au prétexte que le parcours de soins n'est pas respecté. Votre candide de service a ainsi pu m'apprendre que pour une seule patiente, depuis deux ans, mes consultations n'étaient pas réglées. La nouveauté étant qu'à compter de maintenant, j'ai le plaisir d'en être informé !
En effet, jusque-là, les honoraires dus non réglés, c'était « ni vu ni connu ». Je vous laisse imaginer votre réaction si votre employeur vous envoyait votre feuille de paye chaque mois et qu'il vous versait en réalité 30 % de moins sur votre compte.
Je vous entends déjà me répondre qu'il nous suffirait d'une simple vérification pour détecter l'escroquerie et faire valoir vos droits. C'est ce qu'on appelle du rapprochement comptable. Mais, Monsieur Le Directeur, pour vous, c'est une fois par mois. Pour un médecin « de base », comme nos politiques aiment à nous considérer, c'est un rapprochement par jour, entre les tiers payants, les différents versements concernant les 100 %, les 5 euros par patient de plus de 16 ans, les 40 euros pour les ALD, les majorations pour personnes âgées etc.
C'est sûrement pour cet imbroglio comptable que votre même candide m'a répondu que certains de mes confrères prenaient une journée par semaine pour vérifier leurs tiers payants ! Les bras m'en tombent ! Compte tenu de ma durée hebdomadaire de travail, je me refuse à entrer dans ce système qui montre la méconnaissance totale des politiques et administratifs sur ce qu'est le métier de médecin.
En ce jour de conférence nationale de la santé où on va entendre les mêmes propos lénifiants sur le rôle du généraliste, pivot du système de santé, il ne faut pas s'étonner de la désaffection des jeunes pour l'exercice libéral. Dans quelques années, notre ministre, qui fonctionne avec la certitude des imbéciles, aura réussi le tour de force d'avoir détruit l'organisation de notre système de santé avec une médecine salariée, exerçant dans des maisons de santé, payées par le contribuable, où la dimension individuelle du patient aura disparu. Ça ne sera pas, loin s'en faut, une médecine moins chère mais elle sera à la botte des Caisses et des Assureurs.
La CNAM crie haut et fort qu'il n'est pas question d'augmenter la valeur de la consultation, bloquée depuis le 01/11/2011 sous prétexte, selon notre ministre, qu'avec le système des honoraires différés, notre consultation reviendrait à 31 euros. J’ai fait mes calculs avec vos chiffres, Monsieur le Directeur, j'ai bêtement divisé mon chiffre d'affaires fourni par vos soins par le nombre d'actes, toujours fourni par vos services. Le résultat donne 28,10 euros par consultation, un beau différentiel avec les chiffres de notre ministre !
Comment expliquez-vous qu'une consultation de médecine du travail pour une secrétaire, tous les deux ans, nous soit facturée 91 euros par an. Vous me répondez logistique, maintenance, secrétariat etc. Parce qu'un médecin généraliste n'a pas de logistique derrière son acte ? Il n'a pas de matériel informatique, de logiciel dont les coûts de maintenance ont explosé et pour lesquels notre Caisse nous répond que les ROSP sont là justement pour payer les surcoûts et donc ne peuvent être considérés comme une augmentation de revenu. Nous devenons, petit à petit, des salariés déguisés mais nous n'avons pas votre prime d'ancienneté.
Votre logique est irrecevable. Vous pénalisez le médecin alors que c'est le patient qui ne respecte pas le parcours de soins et les règles que vous avez décrétées avec lui.
Vos pratiques déresponsabilisent encore un peu plus les assurés en tiers payant, qui ne viennent pas à leur rendez-vous, sans prévenir, qui ne déclarent pas de médecin traitant. Elles encouragent les confrères peu scrupuleux, adeptes en général du tout tiers payant, à changer à partir de leur poste de médecin traitant, sans en informer le patient.
J'arrive en fin de carrière et suis fier du travail que j'ai pu faire depuis 35 ans, même si l'expérience acquise n'est pas reconnue par nos tutelles.
Je veux vous redire mon écœurement devant vos pratiques qui augurent mal de l'avenir, lorsque nous serons tous dépendants du bon vouloir des Caisses.
Je suis bien sûr disposé à parler de tout ceci avec vous si vous le souhaitez.
Recevez, Monsieur le Directeur, l'expression de mon profond respect et de mon incompréhension.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation