Les épidémies mondiales ne cessent de croître. L’amélioration des conditions d’hygiène, amorcée dès le début des années soixante, n’a pas réussi à les éradiquer. Bien au contraire : en 1960, une centaine d’épidémies humaines avait été recensée et dès 2010, on en dénombrait entre 500 et 600 par an. En outre, chez les animaux d’élevage, le nombre a été multiplié par trois entre 2005 et 2018.
Les déséquilibres entre la nature et l’homme expliquent, en grande partie, cette accélération. Déforestation à outrance, conversion des terres agricoles, intensification de l’élevage… Par le biais des activités humaines, la population est de plus en plus en contact avec la faune et ses nombreuses pathologies. Environ 60 % des maladies infectieuses humaines ont une origine animale. Et ce taux monte à 75 % pour les maladies émergentes actuelles, les animaux pouvant être vecteurs par contact direct ou via leurs sécrétions.
Faune, flore et homme : des liens intimes
La crise sanitaire actuelle a médiatisé les liens étroits entre les santés animale, humaine et environnementale. Comme l’explique Loïc Dombreval, député LREM des Alpes-Maritimes et docteur vétérinaire : « lorsque nous portons atteinte à l’environnement et à la faune sauvage et que nous mettons cette dernière en contact avec la faune domestique – elle-même en contact avec les humains –, nous observons assez rapidement la survenue d’une pandémie ».
Et de préciser : « les experts estiment que dans la nature sauvage, 1 400 000 virus et bactéries cohabitent. Parmi ceux-ci, environ 800 000 seraient pathogènes pour l’homme », rapporte le président du groupe d’études parlementaire « Condition animale ». Ainsi, il existe bien un lien intime entre la faune, la flore et l’homme. Cette relation n’est pas récente. En témoigne la présence de salmonellose, de leptospirose, de brucellose, de tuberculose et de rage dans de nombreux pays du monde. Ou plus récemment, la survenue de zoonoses telles que l’encéphalopathie spongiforme bovine ou la grippe aviaire (H5N1). Les coronavirus, quant à eux, sont bien connus et répandus chez les animaux.
Naissance du mouvement
En 1880, Louis Pasteur, qui n’était ni médecin ni vétérinaire, était pourtant, à la fois membre de l’Académie nationale de médecine et de la Société centrale de médecine vétérinaire (ancêtre de l’Académie vétérinaire de France). Il affirmait « la science est Une… c’est l’homme seulement qui, en raison de la faiblesse de son intelligence, y établit des catégories ». Ce visionnaire prônait déjà une approche sanitaire globale et transdisciplinaire. Une démarche au sein de laquelle médecins, vétérinaires et experts de l’environnement travailleraient main dans la main pour protéger l’humanité. Cette démarche a d’abord été réaffirmée en 2004 lors du premier symposium international appelé « One health, one world » de la Wildlife Conservation Society qui a réuni divers experts pour discuter des maladies communes aux humains et aux animaux. Depuis, les initiatives se sont multipliées.
Vers un Haut Conseil
Mais aujourd’hui, plusieurs éléments constituent un obstacle à la mise en œuvre de l’approche « One health ». « Le fait que les vétérinaires soient encore rattachés au ministère de l’Agriculture pose question. Par ailleurs, médecins et vétérinaires ne travaillent pas assez ensemble », déplore Loïc Dombeval. En octobre dernier, le député des Alpes-Maritimes a coorganisé le colloque « Une seule planète, une seule santé » à l’Assemblée nationale, avec son homologue Yolaine de Courson (Côte-d’Or).
Au cours d’une intervention vidéo lors de ce colloque, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a annoncé, le 12 octobre dernier, le projet d’un Haut Conseil international « aux trois santés » réunissant médecins, vétérinaires et scientifiques dédiés à l’environnement. Ce Haut Conseil devrait faire l’objet de discussions avec l’Allemagne notamment et les organisations concernées comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE).
Cette instance devra rassembler des informations scientifiques fiables sur des thématiques de santé globale, en réunissant des experts ayant travaillé sur le sujet. « Ce Haut Conseil devra surtout diffuser des alertes sur les pandémies naissantes. J’ai émis récemment une proposition de résolution signée par une quarantaine de députés pour que le gouvernement fasse de ce projet une réalité en termes de moyens humains et financiers », note Loïc Dombreval. Cette proposition de résolution devrait permettre de porter un débat dans l’hémicycle d’ici au début de l’année 2021 sur l’approche « One health ». Une chose est sûre, l’Académie nationale de médecine est investie dans cette démarche : l’institution a déjà développé une collaboration interacadémique, notamment avec l’Académie vétérinaire de France, dans l’esprit « Une seule santé »
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