DE NOTRE CORRESPONDANTE
À QUELQUES encablures du phare de Calais, une longue file de migrants s’étire le long d’un bâtiment de briques. C’est l’heure de la distribution du repas. Tous les jours, à 13 heures, les bénévoles de l’association Salam servent un plat chaud aux réfugiés. Une assiette de raviolis, des bananes, une brique de lait, agrémentées d’une tasse de thé fumant qu’ils boivent par petits groupes, assis sur le trottoir. Certains parcourent des kilomètres à pied pour recevoir ce qui est souvent l’unique repas de la journée.
Il y a tout juste un an, Éric Besson ordonnait la destruction de la « jungle » de Calais, livrant aux bulldozers le terrain où 800 Afghans – essentiellement de l’ethnie pachtoune – avaient trouvé refuge. Rasés, les baraquements de fortune érigés tant bien que mal à l’aide de palettes et bâches de plastiques. Un an après, le problème reste entier. Les migrants se sont éparpillés tout le long du littoral, cachés des regards. Mais toujours présents. Certes, leur nombre a fondu : selon les associations présentes sur le terrain, ils sont aujourd’hui 500 disséminés entre Calais et Dunkerque, là où on en comptait jusqu’à 1 500.
« Éric Besson a atteint son objectif : il a réduit les effectifs, mais à quel prix ! Aujourd’hui, les droits de l’Homme n’existent plus à Calais », s’insurge Mathieu Quinette, coordinateur de Médecins du Monde sur le littoral. « Pour les réfugiés en attente d’un passage, la "jungle" constituait un abri, certes précaire, mais où ils pouvaient se reposer, discuter ensemble, cuisiner et se protéger du danger et des intempéries. Aujourd’hui, ils vivent dans la précarité la plus totale ; leurs camps sont systématiquement détruits par la police, et ils font l’objet d’une chasse à l’homme terrible. Dispersés dans la nature, ils sont devenus moins accessibles aux associations et plus à la merci des passeurs. »
Des moyens insuffisants.
Dans le secteur de Dunkerque, Médecins du Monde visite les camps de réfugiés une fois par semaine avec une clinique mobile. Au cours du premier semestre 2010, l’association a assuré 76 interventions et plus de 1 000 consultations. Onze médecins bénévoles et autant d’infirmières se relaient pour assurer cette présence sur le terrain. « Ces moyens sont nettement insuffisants, déplore le coordinateur MMM. Une PASS (Permanence d’accès aux soins) a été créée à Dunkerque, dans les locaux de l’hôpital, mais elle se révèle peu accessible pour les migrants car beaucoup trop éloignée de leurs lieux de squat. Du camp de Loon-Plage, par exemple, il faut marcher 12 km pour s’y rendre. Ce que nous réclamons, c’est une PASS mobile pour aller vers les populations. »
Autre lacune pointée par les associations de terrain : l’absence de prise en charge psychologique. L’errance perpétuelle des migrants ajoutée aux traumatismes subis dans leur pays induit une grande souffrance qui ne trouve pas d’exutoire. « L’hôpital a refusé de budgéter une consultation psychologique, confie Céline Dallery, infirmière à la PASS de Calais. En cas de gros problème psychiatrique, ils sont hospitalisés. Mais rien n’est prévu pour assurer un suivi régulier. Le besoin est pourtant immense : ils sont très fatigués psychologiquement, ne savent plus où ils en sont. Entre les demandes d’asile refusées, les arrestations et les expulsions, ils se sentent pris dans une nasse…Beaucoup vivent constamment la peur au ventre, et se sauvent dès qu’ils aperçoivent les forces de l’ordre. »
Traqués par les CRS, arrêtés régulièrement - parfois plusieurs fois par jour - et relâchés quelques heures plus tard, après l’heure de la distribution du repas, les réfugiés de Calais s’accrochent à leur rêve avec la force du désespoir. Mais les passages en Angleterre sont de plus en plus rares. Et l’espoir s’amenuise de jour en jour.
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