Pertinence rime avec excellence. Et pour offrir de très bons soins, rien de tel que de réunir les acteurs de la médecine spécialisée pour réfléchir à l'évolution des pratiques et s'approprier au mieux les innovations.
Lors des 2e états généraux de la médecine spécialisée, réunis samedi dernier à Paris, le Dr Patrick Gasser, président des « Spé » de la CSMF, a évoqué en ce sens un nouveau « mouvement de rassemblement, le plus large possible » des médecins spécialistes et une future « maison de la création et de l'innovation ».
Au-delà des clivages, ce mouvement des spécialistes se veut « intersyndical », voire « pluristatutaire » (libéral, hospitalier, lucratif ou pas). À terme, l'idée est de s'ouvrir aux autres acteurs médicaux, voire paramédicaux. « Je le vois comme un collectif ou un think tank, précise le gastroentérologue nantais. Nous allons faire une première réunion mi-décembre et nous rendrons début 2019 un travail d'analyse du plan Ma santé 2022. » L'objectif est de fédérer les spés autour de problématiques communes, de promouvoir la place du médecin expert et de peser le cas échéant sur les choix de santé. Un site est en construction pour engager ce travail collaboratif.
Outre ce collectif, le chef de file des spécialistes confédérés veut bâtir une maison de la création et de l'innovation de la médecine spécialisée. Une structure physique réunira différents acteurs – médecins, usagers, ingénieurs, développeurs – dans une sorte de « living lab » ouvert aux innovations technologiques et organisationnelles. « L'idée est de mettre en contact celui qui utilise et celui qui crée. L'innovation et l'excellence n'ont pas à être confinées dans les CHU », résume le Dr Gasser. Des financements industriels sont envisagés pour assurer la pérennité de la structure.
Place d'expert
Ces deux initiatives visent à redonner au praticien spécialiste « la place d'expert qui est la sienne » et à favoriser « le transfert de technologies, de savoirs techniques ou organisationnels entre les différents acteurs de la santé ».
Pour valoriser cette expertise, la pertinence des soins reste incontournable. Lors des états généraux, le Pr Olivier Lyon-Caen, médecin-conseil national de la CNAM, a plaidé pour une approche au plus près du terrain. « Il ne peut pas y avoir de déclinaison possible de la pertinence sans une prise en compte de la pratique des médecins au quotidien. Il faut donc identifier les différents points de rupture et mettre ensemble tous les professionnels. Nous avons un rôle particulier à jouer car nous sommes en relation avec tous les acteurs ».
Dans le cas des radiologues, qui ont signé un protocole de pertinence des actes (sur la lombalgie) avec la Sécu, le travail se fait avec les généralistes. « Il a fallu convaincre que notre rôle d'expert vis-à-vis des médecins généralistes sur la lombalgie allait être modifié, explique le Dr Bruno Silberman, vice-président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). Il y a un enjeu majeur entre le médecin qui demande l'examen, le radiologue qui peut le refuser et le patient qu'il faut convaincre que, si on a mal au dos, il ne faut pas toujours faire une radio. »
Scanners et sinusite
Pour doper cette coordination, la nouvelle communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) est-elle la clé universelle ? Pas forcément, juge le Dr Silberman, pour qui il n'y a pas lieu de « découper » la France en communautés pour que les médecins de terrain se parlent. « L'appropriation de la pertinence des soins sur un territoire pourra se faire avec différents outils, confirme le Pr Lyon-Caen. Cela peut être les instances régionales d'amélioration de la pertinence des soins [IRAPS], les CPTS. Il y a aussi l'accréditation et le DPC. »
La présidente de la Haute autorité de santé (HAS), le Pr Dominique Le Guludec, estime que tous les leviers sont à mobiliser (outils numériques tels que les logiciels d'aides à la prescription mais aussi l'accréditation). Il y a urgence. « Nous ne devons pas nous dédouaner, exhorte le Pr Le Guludec. Combien de scanners réalisés pour des sinusites aiguës ? Cela coûte très cher, et c'est hors recommandations ! Tout cela peut être corrigé dès demain. »
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