« Tous les témoignages que nous avons recueillis vont dans le sens de l’excellence du service de santé des armées (SSA) », déclare le député (UMP) Olivier Audibert-Troin en présentant le 1er rapport d’information, co-écrit avec Émilienne Poumirol, sur « la prise en charge des soldats blessés ».
Cette excellence est en partie due à la capacité d’intervention des soignants auprès d’un soldat blessé dans les dix premières minutes après la blessure, à une prise en charge par un médecin enclenché moins d’une heure après, et à une intervention chirurgicale de sauvetage réalisée moins de deux heures après. Cette médicalisation de l’avant, voire de l’extrême avant pour les opérations spéciales, préférée à un modèle où le soldat est d’abord évacué, est précieuse pour réduire la mortalité. « Aux États-Unis, le taux de létalité du 75e régiment de rangers, unique à adopter cette stratégie, est inférieur de 26 % à celui des autres corps », explique le député Olivier Audibert-Troin.
Prise en charge par l’État des prothèses
« Les huit hôpitaux militaires sont d’une très grande qualité de soins », souligne-t-il ensuite. Interrogé par« le Quotidien » sur la fermeture du Val-de-Grâce, le député a indiqué que « l’essentiel reste que les mailles du filet ne soient pas trop grosses : à Paris, les blessés sont orientés sur les plateaux techniques de Percy ».
La recherche est soutenue, avec 2 millions d’euros consacrés chaque année au développement de la protection balistique, 5 millions d’euros au blindage, 4,5 millions d’euros à la prévention des risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC) et 3 millions, à la protection du bruit et des contraintes thermiques.
Autre point positif : la prise en charge par l’État des prothèses de nouvelle génération, dites bioniques (55 000 euros pour une main, 15 000 euros pour pied-cheville), décidée en 2013. Un million d’euros devrait permettre d’équiper chaque année une quinzaine de militaires.
Trop d’acteurs, mal coordonnés
Le suivi du soldat blessé est en revanche plus contestable. Les cellules d’aide aux blessées, qui existent dans chaque armée, « ne communiquent pas entre elles », déplore Olivier Audibert-Troin. « Elles n’ont pas de budget propre et reposent sur la générosité des militaires et des associations qui lèvent des fonds chacune pour sa structure », poursuit-il. Les députés proposent de colocaliser ces cellules aux Invalides et de mutualiser leurs services support, ainsi que d’y implanter une « maison du blessé » qui aurait fonction de guichet unique.
Ils dénoncent plus durement « le parcours du combattant » administratif que le soldat blessé doit subir pour recevoir sa pension d’invalidité. « Le système est trop complexe, avec des contrôles à tous crins : il faut parfois une double expertise pour une simple entorse à la cheville. Ces expertises sont réalisées très loin du domicile du convalescent », explique Olivier Audibert-Troin. Les délais d’instruction étaient en moyenne de 380 jours fin 2014 mais pouvaient atteindre 600 jours. Le rapport préconise de revoir la liste des médecins experts, en l’ouvrant aux réseaux civils de proximité, et de rendre plus attractives les expertises, quitte à en faire moins.
Mieux reconnaître le syndrome post-traumatique
Tout en saluant les évolutions impulsées notamment par les deux plans 2011 et 2013, les parlementaires incitent à poursuivre les efforts pour reconnaître et prendre en charge le syndrome post-traumatique. « Il n’a été reconnu qu’en 1992 comme blessure de guerre mais ce n’est qu’avec le désengagement de nos forces d’Afghanistan que des progrès ont été faits », explique Olivier Audibert-Troin. En 2007, 10 cas d’états de stress post-traumatique (ESPT) ont été déclarés, en 2010, 136, en 2011, 298, et en 2013, 359.
« Il faut renforcer la prévention, les missions des soldats doivent être préparées. Au retour, ils doivent passer par le sas de 3 jours de décompression », insiste le député. Quelque 3 % des militaires ayant transité par Chypre demandent à rencontrer un psychologue, 1 % d’entre eux sont orientés vers un suivi psychologique.
Numéro vert « écoute défense »
Quant au numéro vert « écoute défense » lancé l’an dernier, il a reçu 330 appels dont 176 pour des ESPT.
Olivier Audibert-Troin souligne la nécessité de suivre sur le long terme les militaires psychiquement traumatisés, un défi d’autant plus délicat que seulement 25 % restent dans l’armée. « L’ONACVG (Office national des anciens combattants et victimes de guerre) doit prolonger dans chaque département l’action des cellules d’aide pour ne pas perdre leur trace », explique-t-il. Un réseau de psychologues civils, formés à la culture militaire, devrait être développé dans les « déserts militaires » indique le rapport.
Et l’insigne des blessés militaires devrait être davantage attribué aux soldats souffrant de traumatismes psychiques. « Jean-Yves Le Drian en a pris conscience », assure le député UMP.
Enfin, les rapporteurs invitent le SSA à produire et communiquer leurs chiffres et statistiques sur les blessés.
Les blessés du SSA
– 101 dossiers de blessés parmi le personnel du service de santé des armées sont enregistrés aujourd’hui. – 54 sont des dossiers actifs : 20 militaires du rang, 25 militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées, 4 sous-officiers et 5 médecins.
Parmi eux, 20 souffrent de syndrome post-traumatique, 3 de maladie, et 31 d’une blessure de guerre physique.
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