Le vote en première lecture du projet de loi de Sécurité sociale (PLFSS) pour 2019 est attendu ce mardi à l'Assemblée après une semaine de débats intenses en séance.
Le gouvernement et le rapporteur général Olivier Véran (LREM, Isère) ont confirmé des dispositions adoptées en commission. L'opposition n'a guère réussi à se faire entendre dans un Hémicycle acquis à la majorité présidentielle. Retour sur plusieurs éléments clés de ce budget, examiné au Sénat à partir du 7 novembre.
• Le forfait de réorientation aux urgences : expérimental !
Le rapporteur général a remporté une bataille en faisant adopter la création d’un forfait de réorientation (20 à 60 euros par patient) pour les services d’urgences qui adressent leurs patients légers vers la médecine de ville. Devant une opposition mobilisée, le Dr Véran a dû batailler ferme, quitte à lâcher du lest. Il est lui-même à l’initiative d’un sous-amendement visant à faire de cet antidote à l’engorgement des urgences une expérimentation sur trois ans (au lieu d’une mise en œuvre immédiate).
L’opposition a raillé cette initiative, jugée « iconoclaste » voire « surréaliste », dès lors qu'elle rémunère les hôpitaux à ne pas soigner mais à transférer certains patients. Le Dr Brahim Hammouche (MODEM) a pris à partie son confrère sur l’incidence médico-légale de son dispositif : « Prendrez-vous cette responsabilité, M. Véran ? », a-t-il lâché. Le soutien sans faille de la ministre de la Santé, appelant les élus à ne pas « tourner en ridicule toute innovation organisationnelle », a joué dans l'adoption de ce forfait.
Campé sur ses positions, le député Véran a rejeté un amendement du Pr Jean Louis Touraine (LREM) visant à sécuriser le protocole en donnant au seul médecin urgentiste (et non à l'infirmière d'orientation) le pouvoir de réorienter un patient. « Les médecins ne vont pas perdre la boule et l'éthique parce qu'ils ont un forfait de réorientation ! », s’est défendu le père de cette innovation clivante.
• Les assistants médicaux en mode turbo
Le gouvernement a fait voter sous les applaudissements et à l'unanimité l'accélération du déploiement des assistants médicaux et des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), têtes de gondole du plan Ma santé 2022.
La ministre de la Santé a apporté des précisions sur leur nature et leur financement. Le profil recherché pour les 4 000 nouveaux assistants correspond plus à un « aide-soignant cherchant une reconversion » qu'à un infirmier. Quand aux CPTS, elles devront couvrir tout le territoire « dans un délai de trois ans ».
Le gouvernement accélère sur le calendrier en pressant les partenaires conventionnels d'engager « dans le mois suivant la promulgation de la loi » des négociations pour définir les modalités de financement. « Nous pensons que c'est aux professionnels de santé de négocier », a indiqué Agnès Buzyn. Un volet de l'amendement inclut les CPTS et les équipes de soins primaires dans le champ des accords cadre interprofessionnels. Revers de la médaille : la ministre donne « trois mois » seulement aux médecins et à la CNAM pour que cette « négo » soit couronnée de succès.
• Chirurgie des cancers : la fin des actes illégaux ?
La proposition visant à attribuer un financement alternatif à la tarification à l'activité (T2A) à certaines chirurgies du cancer – remboursement fondé sur le respect des seuils annuels – est passé comme une lettre à la poste. Cette mesure de « désincitation financière » offre la possibilité à la CNAM de réclamer aux établissements « mauvais élèves » un remboursement des sommes perçues pour des actes réalisés sans agrément.
Le rapporteur général, à l'initiative de cette mesure, a bénéficié de l'avis « très favorable » d'Agnès Buzyn, à l'offensive sur un sujet qu'elle connaît bien en sa qualité d'ancienne présidente de la Haute autorité de santé (HAS) et de l'INCa. « Cette mesure faisait partie du plan cancer 2014-2019 rédigé avec mes équipes. Il faut empêcher les chirurgiens d'opérer certains cancers de l'ovaire, de l'œsophage et de l'utérus. Sans bâton, ils continueront d'opérer. » La ministre a fait la distinction entre les opérations d'urgence et celles programmées. « Si un chirurgien opère un cancer du côlon et découvre une péritonite avec perforation, on ne peut pas lui reprocher d'avoir sauvé la vie du patient. Mais la perte de chance n'est plus "entendable" dans les opérations programmées. »
• Le lobby des patients paye, pas celui des fédérations hospitalières
Les députés ont rendu « obligatoires » les indicateurs de satisfaction des patients dans la valorisation à la qualité des hôpitaux et cliniques (300 millions d'euros pour 2019). Chou blanc en revanche pour les fédérations hospitalières qui, malgré une centaine d'amendements déposés, n'ont pas réussi à s'octroyer un siège autour de la table des négociations conventionnelles et tarifaires entre la CNAM et les libéraux !
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