Article réservé aux abonnés
Dossier

Comment l'intelligence artificielle stimule la santé

Par Sophie Martos - Publié le 11/07/2019
Comment l'intelligence artificielle stimule la santé


PHANIE

« L'IA, tout le monde en parle, mais peu de gens savent de quoi il s'agit ! », ironisait en 2018 le député (LREM) et mathématicien Cédric Villani, auteur d'un rapport pour donner un sens à l'intelligence artificielle.

La révolution des data et des algorithmes d'apprentissage profond charrie son lot de fantasmes dans le champ de la santé. Pas un jour sans que l'on annonce des systèmes autonomes dépassant l’œil du spécialiste pour diagnostiquer des tumeurs ou interpréter des images.  

Aujourd'hui, loin de tuer les métiers médicaux, l'IA en santé ouvre des perspectives prometteuses : améliorer la précocité, la rapidité et la pertinence du diagnostic, détecter des effets secondaires, personnaliser les thérapies, prédire l'évolution d'une pathologie, optimiser les process de développement des médicaments ou optimiser les flux de patients. « L'IA peut s'appliquer à différents types de données : textuelles comme les comptes rendus de médecins, bilans sanguins avec les marqueurs tumoraux, génétiques ou encore imagerie comme les scans, les IRM etc. », analyse le Dr Jean-Emmanuel Bibault, oncologue radiothérapeute et chercheur en IA en santé à Stanford (États-Unis). 

Ébullition

Le secteur est jugé stratégique par l'exécutif qui vient de présenter le volet économique de la feuille de route française en matière d'intelligence artificielle (IA). À ce stade, le gouvernement a annoncé un investissement de 1,5 milliard d'euros d'ici à 2022. Et parmi les premiers projets financés, certains concernent l'amélioration des diagnostics médicaux… Reste qu'avec quatre milliards d'euros mobilisés, le vieux continent part de très loin : les États-Unis ont investi de leur côté 23 milliards d'euros dans l'IA en 2017 et l'Asie 12 milliards.

Mais le train est lancé. Dans le seul champ de l'IA appliquée à la santé, la Banque publique d'investissement (BPI) France, qui accompagne les jeunes pousses, dénombre déjà plus d'une centaine de start-up prometteuses. « 60 % des entreprises santé ont moins de trois ans. L'IA va bouleverser ce secteur dans le diagnostic et la prévention. C’est une opportunité pour les entreprises », pronostique Rosalie Maurisse, directrice innovation chez BPI France. 

En croissance exponentielle (50 % par an), le marché de l'IA en santé se structure autour d'une poignée de thématiques : l’aide au diagnostic et à la décision ; les objets connectés et le monitoring ; la gestion du parcours patient et hospitalier ; la recherche biologique et pharmaceutique. « Le plus mature est celui de l’aide au diagnostic en imagerie car nous disposons de beaucoup de data », analyse Rosalie Maurisse.

Si la France a des atouts solides (dont son excellence académique dans le domaine de la médecine et des mathématiques appliquées), son système de santé hyper régulé peut être un frein au déploiement concret de l'IA en santé, qu'il s'agisse de la collecte de données qualifiées, de l'évaluation des algorithmes ou de l'accès au marché. La structuration des jeux de données sous la houlette du nouveau Health data hub pourrait améliorer la donne.  

A court ou moyen terme, le développement de l'IA transformera les pratiques médicales. La radiologie et l'anatomo-cyto-pathologie (lire ci-dessous) mais aussi l'ophtalmologie, la dermatologie, la cardiologie ou l'oncologie sont en première ligne. « L'IA va libérer du temps médical au profit de temps dédié au patient pour expliquer des diagnostics, décrypte le Dr Bibault. Elle va probablement créer plus de métiers qu'en détruire ».