Très récemment le Quotidien du Médecin a narré les affres des internats. La journaliste de cette revue professionnelle a mis en évidence le fait que les internes quelle que soit leur spécialité, vivent dans des logements insalubres dans certains CHU.
En parcourant les lignes de cet article nous sommes quelque peu surpris par les réflexions de la responsable de l’intendance d’un internat qui n’a pas caché son désarroi, et a accepté de le partager. Cette dernière reconnaît à demi-mot l’insalubrité des lieux, et pointe également le fait que les réparations (comme des fuites) effectuées dans les chambres des internes sont réalisées dans l’urgence.
Il est vrai que cette situation intolérable (et pourtant on n’accepte plus que les mal logés vivent dans des appartements insalubres) est parfaitement connue de tous, et peu d’universitaires ou de directeurs d’établissements acceptent de rénover ce parc immobilier.
Un manque honteux de considération !
Ce qui est choquant dans ce reportage, c’est de voir que la directrice d’un CHU tout à fait au courant de cette problématique explique qu’elle n’a pas le financement suffisant pour effectuer une rénovation des chambres de ces étudiants. Comment est-il possible en 2024 de tenir de tels propos, cela d’autant plus que ces futurs confrères qui travaillent durement dans ce CHU devraient bénéficier de plus de considération ?
Il est vrai qu’à mon époque les administratifs n’avaient pas autant de pouvoir qu’actuellement
Il est vrai que dans mes jeunes années (lorsque j’étais interne), j’ai pu constater que les chambres proposées par la direction hospitalière étaient souvent vétustes. Cependant, et contrairement à l’époque actuelle, j’ai pu sans débourser un centime (il est vrai que nous ne roulions pas sur l’or), être logé gracieusement durant la totalité de mon parcours professionnel durant mon résidanat (on ne parlait pas encore d’interne en médecine générale). Nous avions la possibilité d’être restaurés de manière satisfaisante, et dès lors que nous étions mécontents, la direction acceptait sans rechigner nos demandes. Il est vrai qu’à mon époque les administratifs n’avaient pas autant de pouvoir qu’actuellement. Il suffisait qu’un chef de service tousse un peu fort, et la direction acceptait sans sourciller les demandes formulées.
Ce qui m’a particulièrement choqué dans les propos de la directrice de CHU, c’est le fait qu’elle ne se donne pas la possibilité de répondre aux problématiques de son établissement. Jamais cette dernière n’a mis en avant le fait qu’elle allait réduire la masse administrative de son hôpital. Pourtant, cela est très simple en mettant à la porte les agents en charge de la publicité, de la valorisation de l’établissement ; postes tout à fait inutiles à mon goût. Jamais cette énarque n’a daigné donner des solutions pour donner plus d’attractivité à sa structure.
Ce récit me donne froid dans le dos, car je connais parfaitement la détresse de ces jeunes internes qui travaillent comme des forçats au sein des établissements hospitaliers, cela après avoir achevé un cursus très déstabilisant. Après avoir passé leur ECN (maintenant EDN), ils se frottent à la dure réalité de la pénurie de praticiens au sein du monde hospitalier.
De ce fait, ils doivent mouiller leur chemise, et ne pas calculer leurs heures (on ne permet plus aux apprentis d’avoir un tel rythme de travail), et on ne se donne même pas la possibilité de les héberger de manière convenable. Et encore je ne parle pas de la restauration qui est très fréquemment de très mauvaise qualité.
Comment une directrice de CHU peut-elle avoir si peu de considération vis-à-vis de jeunes qui lui permettent de faire tourner ses services ?
En pratique nous devons comprendre que les professionnels de santé n’ont pas le droit de tomber malade, ni de se plaindre
Alors que les médias ne cessent de parler de dépression au travail, nous voyons que personne ne se soucie du sort de ces internes qui sont malmenés, et mal considérés. Il est facile pour des journalistes de mettre l’accent sur des problématiques que subissent certaines personnes, encore faut-il donner des réponses pour les améliorer.
En pratique nous devons comprendre que les professionnels de santé n’ont pas le droit de tomber malade, ni de se plaindre car ils sont trop heureux d’embrasser une profession qui est jalousée par un nombre important de citoyens. Malheureusement nous oublions que les étudiants en médecine ne sont pas des robots, et qu’en étant des êtres humains, comme tous les autres français, ils affrontent les différentes épreuves de leur cursus avec parfois de grosses difficultés.
Nous ne devons pas oublier que selon une étude relayée par le Quotidien du Médecin, et datant de 2021, près de deux tiers des étudiants en médecine sont en burn-out ou en dépression (1).
Alors faisons le maximum pour les préserver, et les respecter.
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