Ça coince sur les maquettes, l'accès aux options, les effectifs

La réforme du troisième cycle peut-elle capoter ?

Par
Publié le 23/03/2017
Article réservé aux abonnés
troisieme cycle

troisieme cycle
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Alors que des arbitrages majeurs doivent être rendus sur les maquettes des diplômes d'études spécialisées (DES), un vent de fronde menace la réforme du 3e cycle engagée depuis huit ans.

Les derniers textes qui préciseront la durée et le contenu des 43 futurs diplômes, mais aussi les modalités des futures options et formations spécialisées transversales (FST) offertes aux internes, entraînent de fortes crispations. En cause, l'insuffisante concertation mais aussi des querelles de chapelle hospitalo-universitaires.

S'estimant écarté de ce crucial aggiornamento pédagogique, l’Intersyndicat national des internes (ISNI) pourrait déposer un préavis de grève pour le 31 mars, le même jour que les anesthésistes-réanimateurs. « Je suis de plus en plus pessimiste sur l'avenir de cette réforme, juge Olivier Le Pennetier, président de l'ISNI. Tout n'est pas à jeter, le problème est que nous ne sommes absolument pas associés au contenu pédagogique des futurs diplômes. On essaie de nous imposer les maquettes des DES, des options et des formations transversales ». Le feu couve dans plusieurs spécialités. Inventaire. 

L'anesthésie-réa se déchire

La refonte du 3e cycle divise l'anesthésie-réanimation et les partisans de la future médecine intensive-réanimation (MIR). Redoutant la « dislocation » de leur spécialité, plusieurs syndicats d'anesthésistes-réanimateurs (SNARF, SNPHARe et SMARNU), soutenus par le collège et le conseil national de la spécialité et sous l'impulsion du Syndicat des jeunes anesthésistes-réanimateurs (SNJAR), ont déposé un préavis de grève nationale pour le vendredi 31 mars. « Nous avons prévu une journée morte avec un arrêt d'activité au bloc et en réanimation et une grève de la permanence des soins d'au moins 24 heures », explique le Dr Franck Verdonk, président du SNJAR – seules les urgences seront prises en charge.

La répartition des postes d'internat programmée pour la rentrée 2017 au sein du futur co-DES (DESAR MIR) cristallise la colère. Une première mouture proposait 459 postes en anesthésie-réanimation et 97 dans la nouvelle filière MIR. Les anesthésistes-réanimateurs craignent de ne plus pouvoir accéder aux formations et aux unités de réanimation et d'être cantonnés demain au bloc opératoire. La tentative de conciliation de la DGOS (ministère) n'a pas permis de trouver une sortie de crise, au point que les MIR ont proposé « la création d'une nouvelle maquette de formation des réanimateurs en autonomie complète avec la suppression du stage d'anesthésie en phase socle », bref la création d'un DES à part entière.

Les généralistes enseignants redoutent l'évaporation

Le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) craint que les futurs internes soient détournés de l'exercice de leur spécialité. Un projet d'arrêté prévoit que le futur DES de médecine générale, maintenu à trois ans, ne comprendra plus un stage en santé de l'enfant et un autre en santé de la femme comme initialement prévu. Les étudiants devraient suivre l'un ou l'autre et auraient le choix… d'un stage libre « même s'il n'a pas de rapport avec la médecine générale ».

Plus grave aux yeux du CNGE, les internes de médecine générale pourraient accéder à toutes les formations spécialisées transversales (FST) possibles, « formations complémentaires sans rapport avec leur spécialité ». Les universitaires estiment que ces évolutions, combinées à la baisse des généralistes en formation, travestissent la réforme – qu'ils menacent de ne pas appliquer. « En ouvrant l'accès à toutes les FST, on donne le signal aux internes de médecine générale qu'ils pourront faire autre chose, confie le Pr Vincent Renard, président du CNGE. On ne va pas résoudre le problème démographique de notre discipline, on va l'aggraver ! »

Les spécialités médico-interventionnelles réclament 5 ans de formation

Refusant d'être des spécialités « sacrifiées », les internes d'hépato-gastroentérologie, de néphrologie et de cardiologie, militent pour un allongement de leur DES respectif de quatre à cinq ans. « La complexification constante des connaissances et des techniques à visée diagnostique et/ou thérapeutique de nos spécialités rendent indispensable l'allongement global de la durée de formation », réclament-ils. « Des raisons économiques ont été avancées pour refuser d'allonger la durée de formation de nos spécialités, déplorent les trois composantes. La formation d'un interne pendant un an de plus a été jugée une dépense déraisonnable. » 

Hostiles à un contingement strict, les internes exigent également des FST/options « en adéquation » avec les domaines d'hyperspécialisation de ces trois disciplines. 

Christophe Gattuso et Sophie Martos
En complément

Source : Le Quotidien du médecin: 9566
Sommaire du dossier