VOUS SOUHAITEZ engager une nouvelle secrétaire. Vos expériences passées vous ont montré que la période d’essai n’était souvent pas suffisante pour jauger les qualités – et les défauts – de vos salariés. Un confrère bien intentionné a trouvé la solution : commencer par un contrat à durée déterminée que l’on peut poursuivre par un contrat à durée indéterminée si l’on est tombé sur la « perle » ! Malheureusement, le CD est régi par des règles extrêmement strictes, assorties par des sanctions surprenantes, qui réservent son usage à des cas précis et l’empêchent de servir de « période d’essai élargie ».
La règle de base est fixée par l’article L.1242-1 du code du travail : « Un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. »
Vous ne pouvez donc utiliser le CD que pour une tâche précise et temporaire. Le code du travail donne une liste exhaustive des situations visées. Parmi celles-ci, une des seules qui concerne les cabinets médicaux est le remplacement d’un salarié, en cas d’absence ou de suspension du contrat de travail (maladie, congés payés, congés maternité, congé parental).
Autre cas permettant de conclure un CD : l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Il est également possible de faire un CD, pour une durée maximale de neuf mois, dans l’attente de l’embauche d’un salarié en contrat à durée indéterminée non disponible immédiatement.
Par conséquent, en dehors d’un remplacement, si vous recrutez une réceptionniste ou une secrétaire en CD, ce ne peut être que pour une durée réduite et à la condition de démontrer un accroissement temporaire de l’activité de votre cabinet.
À noter que vous ne pouvez pas conclure de CD dans les six mois suivant un licenciement économique pour le poste concerné par le licenciement.
En dehors des éventuelles sanctions pénales que nous verrons à la fin, la conclusion d’un CD dans des conditions irrégulières permettra au salarié concerné de demander la requalification du CD en contrat à durée indéterminée. Si le contrat est encore en cours et s’il obtient gain de cause, vous devrez continuer à le salarier, même si cela ne vous convient pas ! Si le contrat est terminé, il pourra demander des dommages et intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse…
Durée du contrat
En principe, le CD doit comporter un terme précis fixé dès sa conclusion. Mais dans le cas – le plus fréquent pour les médecins, comme nous l’avons dit – du remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat est suspendu, le contrat peut ne pas comporter de terme précis. Il doit alors mentionner une durée minimale. Le CD prend fin à la date du retour du salarié remplacé.
À noter que le terme du contrat fait pour le remplacement d’un salarié peut être fixé à une date antérieure à celle du retour prévu du salarié absent : la date de fin de contrat peut alors être reportée au surlendemain du jour de son retour effectif, pour que le remplaçant puisse rendre compte au remplacé et lui transmettre les informations nécessaires.
Dans le même ordre d’idée, le CD peut commencer avant le départ du salarié remplacé pour que celui-ci puisse transmettre des informations à son remplaçant.
Par contre, si le salarié absent revient avant la date prévue dans le contrat, le CD va jusqu’à son terme et vous devrez alors payer les deux salariés…
Le formalisme
Si vous proposez un CD, vous devrez respecter un formalisme extrêmement strict.
Il faut tout d’abord qu’un contrat écrit soit remis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant le jour de l’embauche. Sinon le contrat sera requalifié en CDI. Il en sera d’ailleurs de même si le salarié ne signe pas son contrat de travail…
Le contrat doit ensuite mentionner obligatoirement le motif du choix du CD par l’employeur, ce dernier pouvant avoir à prouver la réalité de ce motif, en cas d’accroissement d’activité par exemple.
Il doit comporter également, en plus des mentions courantes, :
- Le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée,
- Si le contrat comporte un terme précis, la date de la fin du contrat,
- La durée minimale pour laquelle il est conclu, dans le cas contraire.
Là encore, votre salarié peut invoquer l’omission d’une mention obligatoire pour demander la requalification du CD en CDI !
Les conditions.
Un CD peut comporter une période d’essai. Pour les contrats dont la durée initiale est inférieure à six mois, cette période ne peut dépasser une durée d’un jour par semaine, dans la limite de deux semaines.
La rémunération est également encadrée. Elle ne peut être « inférieure au montant de la rémunération que percevrait, dans la même entreprise, un salarié bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée de qualification professionnelle équivalente et occupant les mêmes fonctions » (article L.1242-15 du code du travail). Et cette obligation est sanctionnée pénalement !
Le CD donne également droit aux congés payés, dès le premier jour, généralement sous forme d’une indemnité compensatrice de congés payés, égale à 10 % de la rémunération brute globale perçue pendant la durée du contrat (indemnité de fin de contrat incluse).
La fin du contrat.
Au terme fixé, le CD cesse de plein droit, sans qu’il y ait de préavis à donner de part ou d’autre.
Le salarié reçoit alors, avec son dernier salaire, une « indemnité de fin de contrat » (appelée souvent prime de précarité), correspondant à 10 % de la rémunération brute totale perçue pendant la durée du contrat (à l’exception de l’indemnité de congés payés). Si la relation contractuelle se poursuit sous forme de CDI, cette indemnité n’est pas due.
Peut-on rompre le CD avant son terme ? Oui, s’il y a accord entre l’employeur et le salarié. Mais il faut être prudent et rédiger un écrit montrant clairement la volonté de chaque partie (et surtout celle du salarié) de mettre fin au contrat.
Si vous tenez absolument à ce que le salarié quitte le cabinet, vous pouvez également lui verser une indemnité au moins égale aux salaires, indemnités de congés payés et de fin de contrat dus jusqu’au terme prévu du contrat… sachant que ce minimum ne peut être réduit par les tribunaux ! Une solution plutôt onéreuse.
Le CD peut également être rompu dans les conditions de droit commun, pour faute grave ou cas de force majeure. À noter que le salarié a le droit de rompre le CD s’il signe un CDI avec un autre employeur.
Les sanctions pénales.
Si vous concluez un CD à tort ou si vous ne respectez pas le formalisme prévu, vous risquez des sanctions pénales impressionnantes : une amende pouvant aller jusqu’à 3 750 euros et même, en cas de récidive, jusqu’à 7 500 euros, accompagnée d’un emprisonnement de six mois ! Ce sera le cas, par exemple, si vous ne mentionnez pas dans le contrat le motif du CD.
En y ajoutant les indemnités auxquelles vous pouvez être condamné par les prud’hommes, on voit que la solution de votre confrère bien intentionné n’est peut-être pas la meilleure…
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique