Comme dans nombre de pays touchés par la crise et la pauvreté, entre 100 et 200 médecins quittent le Nigéria chaque mois. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a émis une alerte en mars sur le nombre de travailleurs médicaux disponibles au Nigeria. Pour tenter de les retenir, un député a déposé début avril une proposition de loi qui les forcerait à pratiquer pendant cinq ans au Nigeria avant d’obtenir leur diplôme. Alors que l’OMS recommande un ratio d’un médecin pour 600 patients, le pays le plus peuplé d’Afrique (plus de 216 millions d’habitants) en compte seulement un pour 10 000 patients. Mais la crise pourrait être bien plus grave selon le président de l’Association nigériane des médecins résidents (NARD), qui avance plutôt le chiffre d’un médecin pour 30 000 patients cité par Le Monde. « C’est un énorme déficit. Il faut parfois attendre des jours pour voir quelqu’un lorsqu’on est malade. Cette situation retarde évidemment les traitements et accroît les tensions à l’hôpital », s’alarme le docteur Emeka Orji, qui juge la proposition de loi « contre la fuite des cerveaux », « draconienne et impossible à mettre en œuvre » et demande son retrait immédiat. Lui préférerait que le « problème soit traité à la source », avec l’amélioration des conditions de travail et des salaires pour les personnels de santé au Nigeria. Dans le pays, les médecins ne bénéficient pas d’assurance ou d’autres avantages liés aux risques professionnels, accrus par le manque d’équipements de protection dans les hôpitaux publics. Mais les désertions sont tout aussi élevées dans les établissements privés où les salaires ne sont souvent guère meilleurs. Ces médecins sont accueillis à bras ouverts, surtout par les pays européens qui manquent de ressources médicales. En décembre 2022, l'Amuf avait dénoncé ces pratiques. « Voulant en attirer encore plus en France, c’est piller ces pays qui les ont formés et qui ont peu de chance de les voir revenir au regard des conditions politiques et économiques souvent précaires qui y règnent », expliquait Christophe Prudhomme alors que le gouvernement souhaitait instaurer un dispositif d'immigration choisie.
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