« La plupart des députés connaissent très très mal nos affaires, ils racontent n'importe quoi », « on a vu des amendements très variés, (…) on a vu de tout et n’importe quoi, de tous les bords »… C’est un Jean-Paul Ortiz agacé et remonté contre les députés qui s’est présenté ce mercredi en conférence de presse au siège de la CSMF pour faire le point sur l'examen du projet de loi santé et les négociations conventionnelles en cours. Le président de la CSMF a notamment déploré « la frénésie réglementaire dont certains députés ont été atteints » qui selon lui « met à bas le dialogue conventionnel ».
CPTS : la CSMF menace de quitter la table des négos
La semaine passée, plusieurs amendements votés à l'Assemblée en commission des affaires sociales avaient fait bondir les médecins : prescription par le pharmacien, désignation du médecin traitant par la CPAM si le patient ne parvient pas à en trouver un… L’un d’eux définissait d’ores et déjà les missions des CPTS, avant même la fin de la négociation entre les syndicats de professionnels de santé et l’Assurance maladie !
Si les deux derniers cités sont censés disparaître lors de l’examen en séance publique, le Dr Ortiz est comme Saint-Thomas : il ne croit que ce qu’il voit. Le néphrologue émet ainsi quelques doutes sur la capacité de la majorité à imposer une discipline à ses députés et ne manque pas de signaler que des amendements ont été votés contre la volonté du gouvernement et qu’Agnès Buzyn a été « battue de multiples fois» lors de l’examen en commission.
« Alors qu’on annonçait un texte court, la CSMF constate que des dispositions multiples s’y sont rajoutées en commission des affaires sociales et sont de nature à créer un conflit dur avec l’ensemble de la médecine libérale », a souligné le patron de la confédération. « Le rôle donné au pharmacien est de cette nature », prévient le Dr Ortiz.
Et le syndicaliste de lancer : « si ces dispositions étaient maintenues lors de l’examen du projet de loi en séance plénière, la CSMF quitterait la table des négociations conventionnelles, et appellerait les médecins libéraux à rentrer dans un conflit frontal et dur avec le pouvoir politique ».
Prescription en pharmacie « pas du ressort des députés »
Sur la prescription en pharmacie, le Dr Ortiz estime que le système actuel, avec une liste de médicament accessibles à tous et une autre répertoriant ceux délivrables uniquement sur ordonnance, est suffisant. D’autant que ces listes peuvent évoluer.
Le patron de la CSMF pointe également un paradoxe. « La cystite (l’une des pathologies visées par la prescription en pharmacie, ndlr) se traite par du Monuril, qui est un antibiotique. D’un côté, on nous dit, "Attention, l’antibiorésistance se développe partout en France" et qu’il faut réfléchir à la prescription des antibiotiques. Et de l’autre, on va mettre le médecin hors de leur circuit de prescription. On a du mal à comprendre. »
Toutefois, Jean-Paul Ortiz ne ferme pas la porte à des expérimentations territoriales dans le cadre d’un exercice coordonné. À condition que celles-ci soient le fruit d’une discussion entre acteurs de terrains. « Il y a probablement des choses à élaborer avec des professionnels. Mais ce n’est pas du ressort des députés ». De plus, le leader confédéral déplore les « nombreux renvois à des ordonnances » qui reviennent, selon lui, à « donner un chèque en blanc au gouvernement ».
Négos conventionnelles : des efforts supplémentaires réclamés
Jean-Paul Ortiz a également fixé ses conditions pour les négociations conventionnelles en cours. Concernant les assistants médicaux, le leader de la CSMF appelle la Cnam à « plus d’ouverture et de souplesse ». Alors que la caisse propose de conditionner l’attribution d’une aide au financement de ces postes à la pratique d’une exercice médical regroupé — sauf dérogation —, le Dr Ortiz estime que « celui-ci ne peut s’imposer immédiatement car cette évolution nécessite du temps ». Il concède néanmoins que « le regroupement des médecins doit être un objectif ».
Enfin, Jean-Paul Ortiz insiste sur la nécessité de parvenir à un accord conventionnel interprofessionnel sur les CPTS qui « tienne compte des différentes modalités de coordination et reste ouvert à une grande variété d’initiatives ». De plus, le néphrologue réclame la valorisation de l’astreinte et des actes réalisés par les praticiens dans le cadre de la mission socle d’accès aux soins non programmés hors PDS.
La CSMF organisera une assemblée générale extraordinaire le 18 mai pour décider de signer ou non l’accord conventionnel interprofessionnel sur les CPTS et l’avenant sur les assistants médicaux, soit un mois après la fin prévue des négociations avec l’Assurance maladie.
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