La note d’étape commandée par la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris à la suite du suicide du Pr Jean-Louis Megnien en décembre dernier se défenestrant de l’Hôpital européen Georges-Pompidou (voir notre article du 7 janvier http://www.decision-sante.com/actualites/article/2016/01/07/suicide-du-…) n’a donc pas convaincu Marisol Touraine. La ministre de la Santé a annoncé le 18 janvier dernier au micro de RTL un jour après sa publication par l’AP-HP la saisine de l’Igas. L’enquête devrait débuter au plus tôt dans un mois. Elle devra compléter l’enquête judiciaire en cours. Le principe en avait été réclamé par l’association Les amis de Jean-Louis Megnien. La direction avait plutôt opté pour une enquête interne « afin d’aller plus vite ». Elle est au final fragilisée par l’annonce de la ministre. Cette première synthèse dresse pourtant un constat sans indulgence du climat délétère observé à l’HEGP. Et pointe de nombreux dysfonctionnements. Certains d’entre eux sont propres à l’HEGP. Mais révèlent en creux « des difficultés d’ordre statutaire et organisationnel ». Les nominations hospitalo-universitaires sont loin d’être transparentes. Et provoquent des tempêtes dont l’effet se prolonge bien après le retour au calme. Quant à la direction générale de l’AP -HP, elle se voit accusée de ne pas avoir mis en place de dispositif spécifique « sur la prévention de la souffrance psychique et la réaction à l’alerte suicidaire ».
Partialité de l’enquête
L’association « les amis de Jean-Louis Mégnien » a immédiatement réagi à cette publication. Et dénonce la partialité de l’enquête. Selon l’association, « tous les médecins de l’HEGP entendus sont ceux précisément dont Jean-Louis Megnien a eu à se plaindre, alors que ceux qui étaient proches de lui au sein de l’hôpital n’ont pas encore pu s’exprimer ». On notera toutefois dans la liste des personnes entendues pour la rédaction de cette note le nom du Pr Bernard Granger, un des membres de l’association.
Harcèlement ?
Mais au-delà de l’émotion, ce drame révèle que l’hôpital, lieu de soin n’est pas protégé du harcèlement. Au cours de la cérémonie des vœux de la Fédération hospitalière de France le Dr Alain Mercuel, psychiatre et chef du service d’appui « santé mentale et exclusion sociales » du centre hospitalier Sainte-Anne a stigmatisé en réponse à une question sur cette affaire le rôle délétère joué par certains mandarins à la tête de pôle. La situation dans quelques cas est même jugée catastrophique. Dans un rapport rédigé par les conférences hospitalières sur le bilan et fonctionnement des pôles, la proposition n° 9 recommandait de favoriser le droit d’expression directe et le dialogue dans les pôles. Serait-ce resté un vœu pieux ? Quant au Mouvement de défense de l’hôpital public, (MDPH), il rebondit sur cette affaire pour mieux pourfendre une nouvelle fois la loi HPST condamnée pour avoir voulu donner le pouvoir sans partage aux directeurs seuls maîtres à bord. Le MDPH appelle à prendre en compte les capacités d’animation, les qualités humaines des postulants à la tête des pôles.
À la suite de ce drame humain, le déballage public ne fait que commencer. Il faut s’attendre à d’autres révélations sur la gestion de certains mandarins de l’hôpital.
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