Nutrition cardioprotectrice

Des hypothèses aux preuves

Publié le 16/02/2015
Article réservé aux abonnés
1424052791586038_IMG_147532_HR.jpg

1424052791586038_IMG_147532_HR.jpg
Crédit photo : PHANIE

La nutrition cardioprotectrice se fonde depuis longtemps sur une alimentation riche en produits végétaux, céréales, fruits, légumes, fruits secs, poisson, huile d’olive et pauvre en viande et produits laitiers entiers.

« Mais plusieurs certitudes et hypothèses ont été ébranlées récemment », a rapporté le Pr Emilio Ros. Tout d’abord concernant l’impact délétère des acides gras saturés (AGS), notablement présents dans la viande et les produits laitiers et dérivés. Deux méta-analyses ont réévalué l’effet des AGS sur le risque de maladie cardiovasculaire. L’une, qui a inclus des études de cohorte, montre qu’il n’y a pas de rapport entre la consommation de ces aliments et le risque de maladie cardiaque, voire un effet protecteur sur le risque de maladie cérébrale (1). L’autre ne montre pas non plus d’augmentation du risque cardiovasculaire (2). Souvent décriés, les produits laitiers ne semblent pas non plus avoir d’effet significatif sur le risque de maladie coronaire ou de diabète, comme l’ont souligné deux autres méta-analyses.

Le rôle de la viande est lui aussi en réévaluation. La viande rouge n’aurait pas d’effet délétère, à l’inverse des produits dérivés comme la charcuterie, riches en sel et conservateurs. Selon l’étude EPIC (3), la consommation de plus de 20 g/jour de produits dérivés est associée à une augmentation de la mortalité totale.

Enfin, plus globalement, l’adage selon lequel « une alimentation pauvre en graisses est bonne pour la santé » est remis en question par les résultats de deux études. L’une ayant inclus 49 000 femmes ménopausées soumises à un régime pauvre en graisses ou normal, qui n’a pas mis en évidence de différence sur le risque de maladie coronaire ou cardiovasculaire (4). La seconde, Look AHEAD (5), qui a inclus plus de 5 000 sujets diabétiques en surpoids suivis pendant presque dix années : malgré une perte de poids, aucune différence n’a été rapportée en termes de risque cardiovasculaire.

« La diète méditerranéenne n’est pas pauvre en graisses, mais riche en huile d’olive, qui peut représenter jusqu’à 20 % de l’apport énergétique », a poursuivi le Pr Ros. L’étude PREDIMED (6) a confirmé les bénéfices d’une diète de ce type enrichie en huile d’olive ou en fruits secs : 30 % de réduction du risque de maladie cardiovasculaire.

Parmi les nouveaux résultats de cet essai présentés par le Pr Ros : la forte protection conférée par cette alimentation sur le risque de maladie artérielle périphérique ou encore l’efficacité de l’enrichissement en huile d’olive, mais pas en fruits secs, sur le risque de fibrillation atriale.

La diète méditerranéenne enrichie s’accompagne d’une réduction du risque de survenue d’un diabète, de 40 % pour le groupe huile d’olive et de 18 % pour le groupe fruits secs. Les analyses rapportent également une diminution des valeurs tensionnelles dans les deux groupes d’intervention, une amélioration du profil lipidique, une baisse de l’insulinorésistance et ce sans gain de poids.

D’après la communication du Pr Emilio Ros, Barcelone, Espagne.

(1) Siri-Tarino PW et al. Am J Clin Nutr. 2 010;91(3):535-46

(2) Chowdhury R et al. Ann Intern Med 2 014;160(6):398-406

(3) Rohrmann S et al. BMC Med. 2013;11:63

(4) Howard BV et al. JAMA. 2006;295(6):655-66

(5) The Look AHEAD Research Group. N Engl J Med 2013;369:145-54

(6) PREDIMED study investigators. N Engl J Med 2013;368:1279-90

Dr Isabelle Hoppenot
En complément

Source : Le Quotidien du Médecin: 9387