« De façon générale, une vie ritualisée, organisée, se répétant tous les jours, est rassurante et valorisante pour le patient et il est donc important de conseiller de modifier le moins possible le mode de vie », souligne le Pr Anne-Sophie Rigaud-Monnet. « Toute nouvelle activité, y compris une visite chez le médecin, est génératrice d’inquiétude et il n’est donc pas utile de parler longtemps à l’avance des rendez-vous à venir. En termes de déplacements, de vacances, l’idéal pour le patient est de bouger le moins possible mais pour l’aidant, changer de lieu est évidemment bénéfique. Une désorientation temporo-spatiale initiale est fréquente et il faut donc préférer les déplacements longs, d’au moins quinze jours et si possible 2 mois et éviter les voyages itinérants ».
De l’ergothérapie à domicile.
Le domicile ne doit pas être trop modifié, un environnement connu étant un facteur de réassurance. La MA s’accompagne à moyen terme d’une altération de l’état général et les petits troubles de l’équilibre et de la marche sont fréquents. Les obstacles à la marche, comme les tapis, doivent être retirés pour prévenir les chutes et il est conseillé de mettre une veilleuse dans la chambre pour éviter tout affolement en cas de réveil ou de lever nocturne. Il peut être utile de faire venir un ergothérapeute à domicile pour une meilleure organisation de l’espace (barre d’appui, douche adéquate….). Des aides financières pour l’aménagement peuvent être obtenues dans certaines conditions
Les troubles de la mémoire et la perte des petits objets du quotidien (clés, téléphone portable, carte vitale…) sont une source d’agacement pour le patient et son entourage. Il faut conseiller de les ranger toujours à la même place et par exemple d’avoir une pochette avec tous les objets indispensables. À terme, il devrait être possible de " taguer" les objets pour les retrouver plus facilement.
« La mémoire procédurale persiste plus longtemps et la pratique de jeux cognitifs plusieurs fois par semaine, qui peut paraître vaine au début, joue souvent un rôle très positif car le patient va progresser au fil des semaines et se sentir de ce fait revalorisé. La stimulation cognitive est bénéfique pour la mémoire procédurale, l’attention et la concentration, sans que ces bénéfices puissent toutefois être généralisés aux autres fonctions cognitives. Une certaine lassitude survient après quelques mois et des travaux semblent souligner l’intérêt dans ce contexte des "sérious games", plus motivants.
Autre trouble qui gêne au quotidien : la répétition en permanence des mêmes questions, source d’angoisse pour le patient qui a oublié qu’il venait d’avoir la réponse et d’agacement pour l’entourage. « Dans ce cas, le mieux est de faire diversion en proposant une promenade, aller faire des courses ou préparer le repas », expose le Pr Rigaud-Monnet. Il en est de même en cas d’idées délirantes (impression de ne pas être chez soi, peur d’être agressé, non-reconnaissance des proches…), qui peuvent survenir de façon labile au cours de la maladie. Parfois, la prescription pour une courte durée de quelques semaines d’un antipsychotique peut être envisagée.
La coordination des acteurs de soin.
« Le médecin généraliste joue bien sûr un rôle majeur dans la prise en charge de ces patients et il ne doit pas hésiter à solliciter un gériatre, notamment par le biais des réseaux gérontologiques qui se développent sur tout le territoire, et les consultations mémoire de proximité dans les situations difficiles. Les aidants, dont la morbimortalité est augmentée, doivent être encouragés à contacter les associations de familles et à solliciter les structures (accueil de jour, de répit) pour souffler de temps en temps », conclut le Pr Rigaud-Monnet.
D’après un entretien avec le Pr Anne-Sophie Rigaud-Monnet, Pôle de gériatrie, Hôpital Broca, Groupe Hospitalier Paris-Centre, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Université Paris Descartes.
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