Les chefs de service prisonniers de leurs plans de carrières ont mis du temps à réagir face à la pandémie. Les médecins hospitaliers se taisent car leurs promotions dépendent de leur coopération. Ils ont le souvenir de médecins célèbres qui avaient été gravement sanctionnés quand ils avaient voulu s’opposer (les Frères Judet au temps de VGE).
Après les grèves de 2019, la crise atteignait des sommets avec le « Blue Monday » du 20 janvier et les démissions hospitalières. Elle est passée au second plan avec l’arrivée de la pandémie mais les problèmes demeurent.
Le Ségur de la santé mis en place après le confinement a entraîné la reprise des contestations car le compte n’y était pas. Ni sur les plans de recrutement, ni pour la formation ou pour les augmentations de salaires. Les paramédicaux seront les premiers servis. Les salaires des internes suivront, pour s’aligner sur le SMIC mais ils resteront insuffisants face au temps de travail et à l'exposition de ces Bac + 8 ou 10. Désespérés, 5 se sont suicidés depuis janvier. Quant aux praticiens hospitaliers, cela reste à écrire compte tenu des multiples statuts.
Le combat des soignants va donc continuer mais reste limité avec la pandémie. Toutefois, il est à craindre que, devant l’immobilisme de l’État, des démissions suivront car les PH se sont mis en grève en janvier.
Les libéraux ont eu droit quant à eux à… « des peaux d’oranges. » Avec 500 millions à répartir, ce sera invisible… Ils devront à leurs frais se fournir en moyens de protection. Décidément, la médecine libérale continuera d’être mal traitée. Les déserts médicaux ne sont pas près de refleurir.
Un État omnipotent et scénario catastrophe
Quatre lois en moins de 20 ans nous ont amenés au bord de l'abîme. Celle sur les droits des malades de 2002 a fait des patients des consommateurs de soins qui ont tous les droits et les soignants que des devoirs. Les lois suivantes ont aggravé la situation (...)
La révolte gronde et l’hôpital se meurt. Les cliniques sont moribondes ou regroupées dans des chaînes, proies faciles pour les fonds de pensions ou les assurances. Alors, les soignants vont-ils se révolter contre cette administration et les agences de santé qui les paralysent ?
Les agences et les énarques sont-ils complices de l’État pour tuer la meilleure médecine du monde ? Avec la détérioration de notre médecine humaniste « y a-t-il réellement un pilote dans l’avion ? » À la vue des décisions qui vont dans le même sens — toujours plus d’administrateurs et moins de soignants — je pense que la direction est toute tracée : toute la santé sous le contrôle de l’État, bref une étatisation. Toutes ces crises en découlent.
L’État, depuis les ordonnances Juppé de 1996 a pris tous les contrôles et a fait des Français des assistés. Après avoir augmenté de façon insupportable les cotisations et créé de nouveaux impôts, il ne restait plus qu'à diminuer le nombre de médecins, Le scénario catastrophe est en place. Le moindre grain de sable va bloquer le système, a fortiori une pandémie.
Les organismes de l’État avaient, en janvier 2020, tous les éléments pour prendre les bonnes décisions. Au nom du principe de précaution, les masques et les tests auraient dû être distribués à tous les soignants et les aéroports fermés. Tester les arrivées et isoler les passagers auraient permis de mieux contrôler l’épidémie, mais rien n’a été fait… À qui la faute ? L’incurie administrative et la multiplication de la haute fonction publique ont paralysé tout le système. Les hauts fonctionnaires devraient y réfléchir (...)
En France, ils restent en place malgré les alternances. Ils sont inamovibles ou promus à de plus hautes sphères s’ils dérangent ; c’est « l’État profond », « les inamovibles de la République », souvent plus compétents que les membres des cabinets ministériels. Les ministres, même s’ils le voulaient, auraient du mal à contrecarrer leur vision. En ces temps de pandémie, c’est une des raisons de la faillite de l’État incapable de prendre les bonnes décisions. Ainsi, faute d'avoir formé des personnels spécialisés en mars 2020 pour réarmer l'hôpital, on a dû subir deux nouveaux confinements et déprogrammer une nouvelle fois la chirurgie.
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