Covid-19 : comment les régions rattrapent le retard

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Publié le 12/03/2021

Avec l’épidémie de Covid 19, les régions ont accusé un retard de dépistage important du fait de la fermeture des sites territoriaux lors du premier confinement. Elles y font face en mobilisant massivement moyens et personnels médicaux. Le Dr Michel Deghaye, président du centre régional de coordination des dépistages des cancers d’Île-de-France, nous détaille l’exemple de sa région.

Entre juillet et septembre 2020, le nombre de mammographies traitées a été augmenté de plus de 40 %

Entre juillet et septembre 2020, le nombre de mammographies traitées a été augmenté de plus de 40 %
Crédit photo : Phanie

« Un retard du dépistage organisé des cancers a été constaté en Île-de-France, surtout au cours du premier confinement », souligne le Dr Michel Deghaye, président du centre régional de coordination des dépistages des cancers d'Île-de-France (CRCDC-IDF). Les centres de dépistage ont été alors tous fermés en France, à l’exception de quelques-uns en Auvergne-Rhône-Alpes et en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA). De plus, les patients ne se sont plus rendus dans les centres d’imagerie médicale du fait des consignes gouvernementales de rester à domicile. « Pour les mammographies, le retard s’est constitué à ce moment-là », pointe le Dr Deghaye.

Quant au dépistage du cancer colorectal, les patients qui avaient à disposition leur test l'ont envoyé au laboratoire Cerba, qui en a fait la lecture. Mais pour les autres, il n'était pas facile d’aller chez le généraliste pour la délivrance du kit. Ainsi, pour le Dr Deghaye, « pendant les mois du premier confinement, de mi-mars jusqu’à mi-mai, on a eu une activité quasiment nulle en matière de mammographie et de test immunologique colorectal ».

Enfin, pour le dépistage organisé du cancer du col de l’utérus (cf. page 30), qui était en cours de mise en place, les patientes qui avaient reçu une invitation pour se rendre chez le gynécologue, leur médecin traitant ou une sage-femme pour faire un test de prélèvement cervico-utérin n’ont pas pu le faire. L’activité de dépistage n’a été reprise en Île-de-France que le 11 mai. « Pendant la période du confinement, un suivi des dossiers à tests positifs a néanmoins été effectué par les médecins coordinateurs, tient à préciser le Dr Deghaye. Ce qui a permis d’informer les patientes de leur positivité afin qu’ellespuissent être prises en charge ».

Cadences et créneaux horaires accrus pour l’imagerie

À partir du 11 mai, les activités de mammographies ont aussi pu reprendre, tout comme la délivrance des tests immunologiques de dépistage du cancer du côlon. « Une augmentation importante des réalisations de ces deux examens a été constatée pendant tout l’été », rapporte le Dr Deghaye. De plus, toutes les invitations prévues avant l’épidémie de Covid ont été envoyées au cours de 2020. Celles pour le dépistage du cancer du sein ont été en nombre égal à celles de 2019, et, pour le dépistage du cancer colorectal, leur nombre a même été supérieur de plus de 56 %. « Il y a donc eu une mobilisation très importante des centres de dépistage pour "hyper-inviter" de façon à compenser le manque de dépistage pendant le premier confinement », souligne le Dr Deghaye. Bilan : 87 % du volume de mammographies faites en 2019 a été réalisé en 2020 et une hausse de 63 % des tests immunologiques a été observée par rapport à 2019.

Un important rattrapage du dépistage organisé des cancers a donc eu lieu en région Île-de-France. Il a été possible grâce à l’augmentation des invitations, mais aussi, pour le cancer du sein, grâce à une hausse de la capacité de lecture des mammographies. Sur la période de juillet à septembre, le nombre de mammographies traitées a été augmenté de plus de 40 % par rapport à une période standard. Ceci tout d’abord grâce à l’implication des médecins radiologues dans les centres d’imagerie, qui ont « augmenté la cadence, ainsi que les créneaux horaires d’examen », rapporte le directeur du CRCDC-IDF.

Heures supplémentaires

Les centres de gestion n'ont pas ménagé non plus leurs efforts, ce qui s'est traduit par des heures supplémentaires. Il a fallu augmenter le nombre d’expertises en deuxième lecture, c’est-à-dire augmenter le nombre de dossiers lus par chacun des deuxièmes lecteurs grâce à des vacations additionnelles. Des deuxièmes lecteurs ont dû être recrutés dans certains départements, en raison de l’afflux des mammographies.

Pour le cancer colorectal, les professionnels et la population ont aussi été sensibilisés par le biais de communiqués, en relation avec l’Assurance-maladie, l’Agence régionale de santé (ARS) et l’Institut national du cancer (INCa). Des déclarations officielles ont contribué à rassurer les patients à propos des conditions du dépistage. Les médecins ont aussi été sensibilisés vis-à-vis du respect des mesures barrières dans les centres d’imagerie afin d'inciter les patients à se faire dépister. Le laboratoire qui lit les tests (Cerba) a également été mis à contribution.

Autant d’efforts qui ont permis l’obtention de résultats chiffrés presque équivalents à ceux de 2019. Néanmoins, il faudra évaluer dans quelques années le retentissement du retard constaté dans le dépistage du cancer du côlon et du sein en 2020. Ainsi que celui du retard dans l’accès aux examens diagnostiques lors du premier confinement. Et enfin, celui du délai augmenté pour la prise en charge et le traitement. « Nous suivons cela de façon très étroite mais pour l’instant, il est beaucoup trop tôt pour en tirer des conclusions », estime le Dr Deghaye.
 

 

Dr Alain Dorra

Source : Le Quotidien du médecin