Adapter la prévention et le parcours de soins au risque de cancer afin de prévenir, dépister et prendre en charge le plus précocement possible. Telle est l’ambition du programme « Interception » lancé par l’Institut Gustave Roussy (IGR, Villejuif).
Fait notable, ce programme est mené en étroite collaboration avec les médecins généralistes (MG) participants, en charge de repérer les patients à haut risque pour les adresser au centre Interception à Villejuif avant de les suivre en coordination avec l’IGR. Mais en pratique, comment ça marche ? Explications de la Dr Suzette Delaloge, directrice du programme.
Repérer en ville en deux minutes
« Les MG participants sont invités à repérer les patients à haut risque à l’aide d’un outil de calcul ne prenant pas plus de deux minutes, explique la Dr Delaloge. Ce questionnaire simple, en ligne, permet de dépister les sujets présentant un haut risque de cancer du sein, du poumon ou de cancer colorectal. Des cancers dans lesquels existent des scores de risque bien documentés, même si fixer un cut-off reste délicat ».
Il est alors proposé à ces patients de participer au programme Interception. S’ils sont volontaires, un rendez-vous est pris à l’IGR. Au sein d’un bâtiment dédié construit sur le site, les patients participent alors à une journée d’information et de sensibilisation. « Cette journée regroupe un bilan de dépistage, des ateliers de groupe, une synthèse personnalisée suivie d’une proposition de programme personnalisé ainsi que son implémentation en pratique clinique », résume l’oncologue.
Les participants bénéficient de mesures de prévention hygiénodiététiques et d’un suivi/dépistage sur mesure, mis en œuvre en ville par le MG. Ce suivi est complété par un questionnaire en ligne annuel. « Et lors d’un dépistage positif en ville, le patient se voit proposer une prise en charge immédiate à l’IGR », précise la spécialiste.
Un potentiel mode de prévention du futur
L’ensemble des étapes d’Interception − repérage, information/sensibilisation, dépistage/prévention personnalisés, prise en charge précoce − devrait permettre de réduire la mortalité spécifique et la morbidité à long terme de ces sujets à haut risque. « En l’absence de bras contrôle, nous évaluerons le bénéfice par comparaison à des cohortes nationales de type E3N-E4N, Constances et à celle de la CNAM, indique la Dr Delaloge. Mais le recrutement de patients volontaires, proactifs peut induire des biais. C’est pourquoi nous suivons de très près l’étude européenne MyPeBS dédiée au dépistage personnalisé du cancer du sein ».
Cette étude en cours réunit déjà 7 000 sujets dont 4 500 à 5 000 patients français. L’objectif est de tester si cette stratégie personnalisée permet de réduire l’incidence des cancers du sein de stade 2 à quatre ans de suivi par comparaison au dépistage standard.
Un vaste projet de recherche sur le haut risque
Interception est aussi un programme de recherche sur le haut risque de cancer. La constitution d’une vaste cohorte va en effet permettre de disposer d’une importante banque de données, notamment sanguines, plasmatiques, urinaires, salivaires, de microbiotes et d’imagerie. « Au sein de ce programme, ce matériel servira cinq principaux axes de recherche, explique la chercheuse. À savoir la recherche de marqueurs de risque spécifiques, génomiques, immunologiques ou encore métaboliques, de stratégies de détection précoce mais aussi de techniques de prévention ciblée ».
Une évaluation psychosociale de la stratégie d’ensemble et des diverses interventions spécifiques ainsi qu’une autre économique et organisationnelle du réseau ville-hôpital mis en place sont aussi prévues.
D'après une conférence de presse de l'Institut Gustave Roussy, 29 janvier 2021.
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