CES CRITÈRES comportent des recommandations de recherche des stades précoces de la maladie qui ont été caractérisés, reflétant une compréhension plus profonde du trouble.
« Ils marquent un changement majeur sur la façon dont les experts considèrent et étudient la maladie d’Alzheimer », précise le communiqué. Ils s’inscrivent dans la suite d’une révision déjà proposée en 2007 par un groupe d’experts coordonnés par le Pr Bruno Dubois. Ces derniers critères couvrent tout le spectre de la maladie et les changements qui surviennent graduellement au fils de nombreuses années d’évolution. Ils abordent la question de l’utilisation de l’imagerie et des biomarqueurs dans le sang et le LCR, « ce qui va aider à déterminer dans quelle mesure les changements dans le sang, le LCR et le cerveau sont associés ». Les biomarqueurs sont de plus en plus employés dans les centres de recherche pour détecter le début de la maladie et pour en suivre la progression. Mais ils ne peuvent pas être utilisés en routine pour le diagnostic clinique sans avoir été testés plus avant et validés.
Trois stades distincts de la MA sont définis.
- Un stade préclinique, pour lequel les recommandations ne s’appliquent que dans le domaine de la recherche, car on ne connaît pas le risque de progression vers la démence lorsque ces critères sont là. Dans cette phase, les changements cérébraux (plaques amyloïdes et dégénérescence neuronale) peuvent déjà être en progression. Les symptômes cliniques ne sont pas évidents. Chez certaines personnes, les lésions amyloïdes peuvent être détectées au PET scan et dans le LCR.
- Le stade de l’oubli bénin de la sénescence (MCI pour mild cognitive impairment). Les recommandations là aussi concernent en premier la recherche. Le stade MCI est marqué par des problèmes de mémoire, suffisants pour être mesurés, mais ne compromettant pas l’autonomie des sujets. Là aussi, la progression vers la MA n’est pas systématique. Les mesures préconisées vont permettre aux chercheurs de se concentrer sur la standardisation des biomarqueurs pour les dépôts amyloïdes et les anomalies cérébrales. Actuellement, les biomarqueurs incluent des taux élevés de bêta-amyloïde dans le LCR, une réduction de la consommation de glucose par le cerveau (déterminée par PET-scan), une atrophie d’aires cérébrales spécifiques (visibles à l’IRM). Ces tests sont utilisés d’abord pour la recherche, mais ils peuvent être appliqués dans les lieux de soins spécialisés en complément des tests cliniques standard pour aider à déterminer la cause des symptômes d’oubli bénin.
- La démence de type Alzheimer. Les critères s’appliquent aux stades finaux de la maladie. Ils montrent comment les cliniciens doivent appréhender l’évaluation des causes et de la progression du déclin cognitif. Les recommandations étendent aussi le concept de démence de la MA au-delà de la perte de mémoire, dans ses caractéristiques les plus centrales. Un déclin dans les autres aspects de la cognition, tels que le manque de mot, les problèmes visuo-spaciaux, les altérations du raisonnement et du jugement, peuvent être les premiers symptômes observés. À ce stade, les résultats des tests des biomarqueurs peuvent être utilisés pour accroître ou réduire le degré de certitude du diagnostic de démence d’Alzheimer et pour la distinguer des autres formes de démences. Même si la validité de ces tests reste à l’étude pour leur application et leur valeur dans la pratique quotidienne.
Un progrès.
Pour le Pr Bruno Dubois (Institut Mémoire et Maladie d’Alzheimer, hôpital de la Pitié-Salpêtrière) qui a fait partie du comité d’experts qui ont édicté ces recommandations, « c’est un progrès par rapport aux critères de 1984. Je regrette simplement qu’ils aient souhaité maintenir la référence à la démence et au MCI, alors que nous avions proposé en 2007 que le diagnostic de la MA puisse être fait dès les premiers symptômes, avant même que les patients n’atteignent le stade de démence, compte tenu du fait que les biomarqueurs permettent pratiquement d’affirmer la maladie lorsque les signes spécifiques sont présents. Leur intérêt c’est de proposer des critères de sujets à risque présymptomatiques, ce qui est une notion intéressante pour des recherches de prévention, mais doit être manipulé avec beaucoup de précaution, car on ne connaît pas les algorithmes de conversion vers la maladie. Le risque serait d’annoncer à un sujet sain qu’il va développer une maladie qu’il ne développera peut être jamais ».
La recherche montré que la MA peut occasionner des changements dans le cerveau une décennie ou plus avant l’apparition des symptômes et que ces symptômes ne sont pas toujours directement reliés aux anomalies cérébrales. Par exemple, certaines personnes âgées ont des plaques amyloïdes, mais n’ont pas présenté de signes de démence. Les critères édictés à l’origine (en 1984) étaient les premiers à prendre en compte cette maladie, mais ils ne décrivaient que les stades tardifs, lorsque la démence est devenue évidente. Ils reflétaient alors les connaissances limitées de la maladie. Ils définissaient la MA sur un seul stade, celui de la démence, décrite cliniquement. Il était présumé que les personnes n’ayant pas de symptômes de démence n’avaient pas la MA. Et le diagnostic ne pouvait être affirmé que par l’autopsie, en présence des plaques amyloïdes et des fibrilles de protéine tau.
Alzheimer & Dementia : the Journal of the Alzheimer’s Association, en ligne le 19 avril 2011.
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