«NOTRE DÉCOUVERTE a d’importantes implications pour deux maladies dévastatrices, celles d’Alzheimer et d’Huntington. Elle suggère que l’enzyme KMO est une bonne protéine que nous pouvons cibler avec des médicaments dans diverses maladies neurologiques. Avec de la chance, le Dr Muchowski et ses collègues pourraient commencer a evaluer le JM6 d’ici 2 ans», estime le Dr Lennart Mucke, de l’Institut Gladstone a l’université de San Francisco où s’est déroulé cette recherche.
Dans les maladies d’Alzheimer et d’Huntington, les mécanismes moléculaires de la neurodégénérescence restent incertains et il n’existe actuellement aucun traitement qui modifie leur évolution. Le Dr Paul Muchowski et son équipe ont identifié une nouvelle approche prometteuse.
De précédentes études animales avaient suggéré que des métabolites de la voie de la kynurénine, générés par la dégradation du tryptophane, sont liés à l’excitotoxicité neuronale par stimulation excessive des récepteurs du glutamate. Ils contribuent ainsi à la pathogénese des maladies neurodégénératives comme celles d’Alzheimer et d’Huntington.
Au contraire des métabolites toxiques de la voie de la kynurénine, tel que l’acide quinolique (ou QUIN), l’acide kynurénique (ou KYNA) est un métabolite neuroprotecteur formé dans une branche secondaire de la voie de la kynurénine. De fait, dans les maladies d’Alzheimer et d’Huntington, l’excitotoxicité neuronale médiée par les récepteurs du glutamate et la formation des radicaux libres sont corrélées a une baisse des taux de KYNA.
Production accrue du KYNA neuroprotecteur.
L’inhibition de l’enzyme KMO (kynurénine 3-monooxygénase), au point de branchement, dévie le métabolisme de la voie de la kynurénine vers la production accrue du KYNA neuroprotecteur. Ainsi, une stratégie rationnelle pour traiter ces maladies pourrait être de normaliser les taux cérébraux de KYNA en inhibant l’enzyme KMO.
Muchowski et coll. ont synthétisé un pro-médicament inhibiteur du KMO, appelé JM6, qui après administration orale se transforme lentement dans l’organisme en Ro 61-8048, un inhibiteur instable connu du KMO. Les chercheurs montrent, chez les souris, que l’administration orale prolongée du JM6 inhibe l’enzyme KMO dans le sang, ce qui a pour effet dans le cerveau d’augmenter les taux du KYNA neuroprotecteur et de diminuer le glutamate extracellulaire excitotoxique.
Le JM6 ne passe pas la barrière hémato-méningée, ni son métabolite le Ro 61-8048, et l’inhibition du KMO survient dans le sang. Cette inhibition périphérique facilitera l’évaluation du JM6 chez les patients, car son effet pourra être confirmé par simple test sanguin.
Testé sur un modèle murin transgénique de maladie d’Alzheimer, le JM6 prévient les déficits de mémoire spatiale, le comportement lié à l’anxiété et la perte synaptique. Chez des souris, modèles de la maladie d’Huntington, le JM6 prolonge également la durée de vie, prévient la perte synaptique et diminue l’activation microgliale.
«Ces résultats sont en faveur d’un lien crucial entre le métabolisme du tryptophane dans le sang et la neurodégénérescence. Ils procurent une base pour un traitement des maladies neurodégénératives», concluent les chercheurs.
Cell 2 juin 2011, Zwilling et coll.
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