« La prévalence de l’asthme reste élevée en France. Il touche 6,4 % des adultes et 10 % des enfants. La maladie n’est pas contrôlée chez deux tiers des patients, alors que l’on dispose de traitements efficaces. Elle est responsable de 800-900 décès/an. L’asthme, en particulier dans sa forme sévère − 5 à 10 % des asthmes − constitue donc toujours un problème de santé publique. C’est la raison pour laquelle nous avons réédité cette année un livre blanc, le dernier datant de 2005. Il propose 33 mesures concrètes pour mieux accompagner les patients souffrant d’asthme et d’asthme sévère », résume la Pr Chantal Rahérison-Semjen (CHU de Bordeaux), présidente de la Société de pneumologie en langue française (SPLF).
Améliorer le parcours de soin
Bien que l’asthme ne soit pas trop mal pris en charge en France, deux tiers sont encore mal contrôlés, avec à la clé un risque de complications. Cela alors qu’on dispose aujourd’hui de traitements pharmacologiques efficients, y compris pour les asthmes sévères depuis l’introduction des thérapies ciblées anti IgE et anti-IL5. Pour y remédier, il faut améliorer le parcours de soins des patients, et généraliser la mesure du souffle en consultation. « Essentiellement pris en charge par les médecins généralistes, ils doivent être adressés à un pneumologue dès qu’on suspecte un asthme sévère. Aujourd’hui, nombre d’entre eux suivent en effet un parcours de soin erratique de plusieurs années avant d’arriver chez un spécialiste », souligne la Pr Rahérison-Semjen.
Favoriser l’activité physique et la réadaptation
Encore trop d’enfants asthmatiques sont exclus des activités physiques. Et les adultes n’en pratiquent pas toujours. Or, au contraire, pratiquer une activité physique est essentiel, en réadaptant au besoin les patients. « L’activité physique devrait à ce titre faire partie des prescriptions médicales. Il faut aussi organiser la formation des enseignants et éducateurs sportifs à la prise en charge des enfants et adolescents asthmatiques. Dans cette optique, la participation du ministère des sports à la rédaction de ce libre blanc est une avancée, note la Pr Rahérison-Semjen. Il faut à l’avenir développer une culture de l’asthme et lutter contre les idées reçues, en particulier chez les enseignants et éducateurs sportifs. »
Minorer la pression environnementale
« Outre le ministère des sports, cette nouvelle édition du livre blanc a fait participer − c’est une grande première − le ministère de l’écologie, se félicite la Pr Rahérison-Semjen. L’asthme étant aussi une maladie environnementale, réduire la pression environnementale est essentiel : l’environnement extérieur, intérieur, et aussi l’habitat insalubre. »
Concernant la pollution intérieure, des conseillers en environnement intérieur existent. Ils peuvent intervenir au domicile, mais aussi à l’école. Seul bémol, l’accès à ces conseillers est très inégal en fonction des territoires.
Quant à l’habitat insalubre, il est pourvoyeur d’humidité et moisissures, qui dégradent la santé respiratoire et allergique. L’humidité et les champignons sont d’ailleurs présents dans nombre d’habitats, en dehors d’un état de réelle insalubrité. « En parallèle de l’édition du livre blanc, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée Nationale par la députée Agnès Firmin Le Bodo. Un fait assez inédit pour être souligné », note la Pr Rahérison-Semjen. Elle vise à prioriser l’accès au diagnostic d’insalubrité des logements quand des asthmatiques y vivent. Les délais sont en effet souvent bien longs. Le projet de loi s’attache aussi à ce que diagnostic soit utile, donc soit suivi d’effets à savoir l’accès sans délai des asthmatiques à un relogement salubre.
« Il ne faut pas oublier la lutte contre le tabagisme dès le plus jeune âge, le suivi de l’évolution des pollens mais aussi la pollution environnementale liée aux produits chimiques utilisés en agriculture, en particulier les pesticides, rappelle la pneumologue. Les agriculteurs et leurs proches voisins ont beau être à l’abri de la pollution urbaine, ils payent, eux aussi, un tribut environnemental à l’asthme lié à l’épandage de ces produits ». Une lutte sur tous les fronts, en somme.
Exergue : Il faut lutter contre les idées reçues, en particulier chez les enseignants et éducateurs sportifs
Entretien avec la Pr Chantal Rahérison-Semjen (CHU de Bordeaux), présidente de la SPLF
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