Fabrice Gzil, docteur en philosophie, responsable du pôle Études et recherche de la Fondation Médéric Alzheimer nous invite dans son dernier ouvrage* à regarder la maladie d’Alzheimer sous le prisme du temps. Elle serait même la maladie du temps par excellence. En premier lieu parce que, comme la peste ou la lèpre en leur temps, ou plus récemment le cancer et le sida, elle est devenue le réceptacle des peurs de l’époque. Ce que redoutent désormais les individus, explique l’auteur, c’est moins de mourir que de faire l’expérience d’une vie qui ne serait plus vraiment une vie et qu’ils ne considèrent plus comme digne d’être vécue. Le statut assigné à la maladie d’Alzheimer dit beaucoup de l’homme d’aujourd’hui, attaché à son identité personnelle, sa conscience d’être un individu singulier, à son indépendance et donc sa capacité à prendre soin de lui-même, et à son autonomie, sa capacité d’exercer une souveraineté sur sa propre vie. La maladie d’Alzheimer serait ainsi l’ombre portée des progrès de la médecine qui, en permettant de vivre plus longtemps, au-delà de ce que la nature a prévu, seraient responsables de cette vie brisée par les troubles cognitifs. Cette idée extrêmement délétère doit être combattue, insiste Fabrice Gzil en rappelant que ce dont ont le plus besoin les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, c’est justement que la médecine et, plus largement la culture humaine ne les abandonnent pas à leur sort.
Et si la temporalité très particulière de l’évolution de la maladie place le soignant dans une position inconfortable, déjouant les modèles habituels du soin et l’obligeant à réviser en permanence les objectifs thérapeutiques, elle est un bon point de départ pour repenser le soin. Comprendre les transformations du vécu temporel occasionnées permet de mieux appréhender pourquoi ceux qui accompagnent les malades sont en permanence soumis à la tentation de l’abandon et de l’indifférence.
* La maladie du temps, sur la maladie d’Alzheimer, PUF, mars 2014, 6 euros.
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